Carcassonne. Peur d'être tabassé au collège Chénier


Peur d'aller au collège par peur d'être tabassé sans retenue par des dizaines de camarades. ça s'appelle «le jeu d e l'abattage». Enquête au collège Chénier.
Ce jour-là, jour de son anniversaire, cet élève demi-pensionnaire du collège Chénier ne mangera pas à la cantine. Sa maman raconte : « Mon fils a peur. Il m'a dit qu'il n'allait pas y couper. La prochaine victime de l'abattage, c'est lui ».
Le jeu de l'abattage serait le dernier passe-temps à la mode des collégiens dans les cours de récréations. De quoi s'agit-il ? D'un engrenage aussi bête que méchant. Une élève est pris à partie. On commence à lui donner quelques tapes amicales. L'espace de quelques secondes, un groupe se forme autour de l'enfant auquel ses camarades de plus en plus nombreux infligent une pluie de coups, de plus en plus en forts. L'an passé l'adolescent cité plus haut a déjà subi ce traitement. Il est rentré chez lui avec un œil au beurre noir. Le père avait déposé plainte. « La blessure n'était pas gravissime, cependant mon garçon a été choqué, raconte la mère. Nous sommes à quelques jours de son anniversaire, je sens que mon fils a la pression ».
L'anniversaire n'est pas la seule motivation de ces agressions. Les bons élèves sont des cibles privilégiées de ces bizutages. Une élève de troisième, au collège Chénier, témoigne : « Dans ma classe, c'est mal vu d'être bon, c'est presque la honte d'avoir des bonnes notes. On se fait insulter. Alors, on garde le silence pendant les cours ». Se taire, se fondre dans le moule seraient devenus la seule issue de secours pour les collégiens bien notés. Le principal du collège Chénier, Yannick Callat, ne nie pas l'existence de ces rituels qui ont toujours existé dans les cours de récréation à la pré-adolescence et à l'adolescence. « Se faire remarquer n'est pas dans les codes à ces âges là, déclare ce chef d'établissement. C'est vrai de la tenue vestimentaire comme du comportement en classe ». La différence avec les générations précédentes, note Yannick Callat, tient dans le comportement des plus jeunes. « Je ne connais pas la raison qui pousse nos élèves en classes de 6e et 5e à être plus violents que leurs aînés. Nous en voyons qui titillent sans crainte les plus grands, et ce n'est pas un jeu. C'est une évolution qui interroge notre communauté éducative, ces gamines ne se font pa de cadeaux ».
Après le jeu du foulard, les jeux de strangulation, le jeu de l'abattage a fait son entrée dans les cours de récréation. Pas partout si l'on en croit les réactions (ci-dessous) des principaux des autres établissements secondaires à Carcassonne. « Le collège est le reflet de la société, le tri se fait chez nous », observe quant à lui Yannick Callat.
Des jeux plus ou moins bêtes et méchants
«Des jeux bêtes, nous en avons plein les rayons, mais nous ne vivons pas dans le neuf-trois». Valérie Desmaretz, principale du collège Emile Alain partage le sentiment de sa collègue Monique Renaudeau à Varsovie. A Grazailles, Alix Barrio est témoin de temps à autre de violences sans conséquences. «On se poursuit, on se bouscule, il arrive que l'on se fasse mal involontairement». Rien de comparable avec les motivations et les blessures qui peuvent être in fligées par le jeu de l'abattage. Au collège du Bastion, Bernard Valet a été obligé d'intervenir pour interdire cette pratique. «L'abattage, dit-il, est un jeu à risque, il ne faut pas nier l'existence. Ce n'est pas courant mais ça se peut se produire. A chaque fois nous essayons de répondre de façon juste et éducative». Le règlement intérieur des collèges ne résout pas tous les problèmes. Au collège Chénier, celui-ci est modifié chaque année, il insiste particulièrement sur la tenue vestimentaire à telle enseigne que les récalcitrants sont priés de rectifier leur «costume» en enfilant un tee-shirt XXL imposé par le collège.
Le chiffre : 432
élèves > Collège Chénier. « Prendre des coups au collège est inadmissible. Le danger serait de banaliser ces violences », exprime le principal de cet établissement en centre ville de Carcassonne.

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